Pieros

La prise en charge périnatale à la limite de la viabilité pose des problèmes éthiques et décisionnels aux équipes soignantes. Ces décisions, ainsi que les informations données aux familles, sont basées sur la connaissance du pronostic tel qu'il est évalué par les études épidémiologiques nationales et internationales. Cependant, ces données peuvent différer significativement de celles du centre dans lequel chaque enfant est pris en charge. L'objectif de cette étude est de décrire la morbidité, la mortalité et le devenir à deux ans des enfants extrêmement prématurés nés dans une unité de soins intensifs néonatals de niveau III, afin d'évaluer l'ampleur de la différence avec les données nationales et internationales. Une étude de cohorte rétrospective a été menée sur tous les nourrissons nés entre 22 et 25 SA et soignés dans une unité de soins intensifs néonatals de niveau III entre janvier 2010 et décembre 2019. Nous avons analysé la mortalité, la morbidité et la survie sans morbidité sévère (hémorragie intraventriculaire de stade≥3, leucomalacie périventriculaire, rétinopathiede stade≥3, dysplasie broncho-pulmonaire sévère, entérocolite nécrosante de grade≥2). Le taux de survie à 2 ans sans troubles neurodéveloppementaux modérés à sévères a été évalué (paralysie cérébrale, perte auditive >40 à 80 dB, cécité). Parmi les 294 nouveau-nés inclus, 29 sont décédés dans la salle de naissance et 265 ont été admis à l'unité de soins intensifs néonatals, parmi lesquels 61 % ont survécu jusqu'à leur sortie de l'hôpital : 0 % à 22 semaines, 20 % à 23semaines, 52 % à 24 semaines et 79 % à 25 semaines. La survie était plus élevée que celle observée dans l'étude EPIPAGE 2 et proche de l'étude EPICURE 2, NICHD et EXPRESS. La survie sans morbidité sévère était de 57 %, ce qui était cohérent avec d'autres études. La survie à 2 ans sans trouble neurodéveloppemental modéré/sévère était de 57 %. Cette étude suggère une augmentation de la survie entre 22 et 25 SA par rapport à la récente cohorte nationale, sans augmentation des morbidités sévères. Ces résultats suggèrent que les données locales doivent être prises en compte dans la décision éthique d'initier ou non une réanimation chez les prématurés nés à la limite de la viabilité.